Le chrome, un élément métallique naturel présent dans la croûte terrestre, peut se présenter sous de nombreuses formes différentes. Seuls les composés trivalents (chrome III) et hexavalents (chrome VI) sont présents de manière significative dans l'environnement. Le chrome VI n'existe pas dans la nature, mais il est produit par l'oxydation anodique du chrome III. Ce processus lui confère une énergie potentielle très élevée, qu'il libère en oxydant les éléments avec lesquels il entre en contact.
L'industrie sidérurgique représente 90 % de l'utilisation du chrome dans la production d'aciers inoxydables, d'aciers spéciaux et d'alliages. Il améliore la dureté du métal et la résistance à la corrosion. Si le chrome III est un oligo-élément essentiel pour notre organisme, le chrome VI est considéré comme cancérigène. Il est inscrit à l'annexe XIV du règlement REACH depuis 2013, prévoyant l'interdiction et la substitution progressive de son utilisation.
Si des procédés alternatifs ont fait leurs preuves (dépôt sous vide, etc.), ils présentent encore de nombreuses limites et ne répondent pas pleinement aux performances attendues. Certaines applications, comme le chromage électrolytique de pièces à géométrie complexe, ou la préparation de surface, notamment pour le magnésium, restent sans remplacement...
Ces réglementations exigent un certain nombre d'analyses pour identifier et/ou quantifier le degré d'oxydation. L'XPS est la méthode de choix pour cette application. En XPS, la surface de l'échantillon est irradiée par des photons de rayons X provenant d'une source monochromatique. Les atomes situés dans les premiers nanomètres émettent des photoélectrons avec des énergies caractéristiques de chaque élément et de son environnement chimique. Les spectres obtenus montrent le plus souvent l'énergie de liaison (la différence entre l'énergie des rayons X et l'énergie cinétique des photoélectrons) en fonction de l'intensité (le nombre de photoélectrons émis).
Des informations chimiques sur les échantillons, telles que leur état d'oxydation, sont obtenues en traçant les variations de l'énergie de liaison. Le XPS offre plusieurs modes d'analyse, dont l'un, le mode spectroscopie, permet l'analyse élémentaire et chimique de l'extrême surface. Ce mode est disponible dans différentes configurations : analyse ponctuelle (quelques dizaines de µm2 à 300 x 700 µm2), linescan (quelques mm par cm dans la direction x ou y) et grid (pour des études d'homogénéité sur des surfaces allant jusqu'au cm2). La profondeur d'analyse varie entre 3 et 10 nm (en fonction de l'angle entre le détecteur et la normale à la surface).
Une plaque d'acier traitée anti-corrosion est découpée sur 1 cm2, puis fixée sur la platine de l'XPS. L’analyse XPS a été réalisée en détection normale (profondeur d'analyse proche de 10 nm) et en mode haute résolution.
Les données XPS sont collectées avec une source AlKα monochromatique. Le spectre Cr2p3/2 à haute résolution du chrome est illustré à la Figure 1. L'analyse chimique du pic Cr2p3/2 du chrome révèle 5 contributions, dont 4 sont liées entre elles en termes d'énergie de liaison, d'intensité relative et de largeur de la demi-valeur. Selon la littérature, ces contributions correspondent à une empreinte du chrome III. La cinquième contribution est détectée à environ 579,5 eV, une énergie de liaison souvent attribuée au chrome VI. L'analyse chimique par XPS en mode haute résolution donne accès à la quantification du chrome VI par rapport au chrome III, dans une limite de détection proche de quelques dixièmes de % atomique. Ceci permet d'évaluer les procédés de traitement de surface en fonction de leur capacité à générer du chrome VI.
D'autres études ont démontré la capacité de l'XPS à évaluer l'homogénéité d'un traitement sur différents substrats.